Journal de mon confinement #1

Mardi 17 Mars

Aujourd’hui à midi, le confinement total entre en vigueur pour 15 jours minimum. Les premières angoisses apparaissent déjà. Je m’imagine en proie à l’ennui, faire les cent pas entre le canap’ et le frigo. Cloîtrée à la maison, à quoi vais-je dépenser mon énergie ? Vais-je trouver le sommeil le soir ? Oppressées par la perspective d’enfermement des deux semaines à venir, on établi un programme. L’objectif : occuper ces 360 heures. Rythmer les journées pour conserver une discipline et ne pas se laisser aller à la léthargie. Entre un enfant de 6 ans et deux psychomaniaques de l’organisation, chacun ses préoccupations. La mission : concilier l’école à la maison, le télétravail de ma moitié et mon désœuvrement dans notre 70m2 mansardé. La maison s’apprête à devenir une reconstitution de l’URSS en 40.

9h00

Les commandements pour que le confinement ne dégénère pas en remake de Battle Royale

  1. Culture physique : la quatorzaine sera mise à profit pour prendre de l’avance sur notre « summer body ».
  2. Hygiène : un slip propre chaque jour.
  3. Alcool : la consommation sera régulée par une seule règle : tant qu’il y en a il y en a !
  4. Grignotage : chaque ouverture du frigo nécessitera la présentation d’une attestation dérogatoire d’alimentation.
  5. Rangement : mise en quarantaine immédiate de tout lego s’aventurant hors de son périmètre d’habitation.
  6. PQ : lancement d’une culture en hydroponie.

9h30

L’heure de l’école à la maison : faute d’accéder au blog de la maitresse, qui ne supporte visiblement pas l’afflux « massif » de connexions, je me retrouve déjà à inventer des devoirs pour occuper le ressort à « maman ». Je lui donne à recopier ce qui constituera le planning de ses 14 prochains jours, sur une affiche A3. Il se met à pleurer quand il découvre le concept des « temps d’étude », et me demande entre deux larmes si les pauses sont autorisées. Il se croyait en vacances, naïf.

Ma moitié lutte pour installer Skype mobile et assister à des réunions où personne ne s’entend parce que le réseau est saturé de télétravailleurs frénétiques. Pendant ce temps, je m’installe pour écrire, et ne peux pas aligner trois mots sans me faire interrompre par mon fils qui ne sait pas de quelle couleur il doit recopier le « temps de gymnastique », ni si il doit sauter une ligne entre deux phrases.

12H00

On passe à la gym. Clara anime la session. On pompe, on court, on saute, elle s’est crue sur les dalles d’Olympiades. Après trois jumping-jack, mon fils simule une rupture du ligament croisé antérieur gauche de la cheville droite. Il passera le reste de la séance à vagir, échoué sur le tapis.

13H00

Réunis autour de la table, premier conseil de maison. Il est déjà temps de réajuster la cohabitation. Ma moitié appréhende la promiscuité prolongée. Chez nous, pas de cloisons, de coin à soi où s’isoler, mais une grande pièce à vivre, lumineuse. Alors on installe un rideau de fortune pour délimiter deux espaces, et on limite l’accès au salon au petit prince, qui dispose de la seule chambre.

17H00

Nouvelle disposition, nouvelle ambiance. L’après midi file comme une lettre à la poste, et c’est l’heure tant attendue du « temps d’écran » pour la crapule. Je souffle enfin.

Episode précédent : Journal de mon confinement #0

A propos de Bahia L. 32 Articles
A mes inexistantes heures perdues, je cultive l'ennui et la lenteur, et n'ai de meilleure compagnie que celle du vide et du silence. Le reste du temps, j'aspire à ne rien faire. http://eklektike.com/ https://www.facebook.com/bahia.lachnani