Journal de mon confinement #7

Lundi 23 Mars

Tic… Tac… Tic… Coup de balai, vaisselle… Tac… Tic… Tac… Tic… Maman… Devoirs, histoire, tri d’un tiroir… Tac… Tic.. MAMAN… Partie de Uno, rangement des legos…Tic… Tac… MAMAAAAAAAN… Préparation du repas à quatre variantes pour qu’il y ait le choix… Tic… Tac… bataille d’oreillers…Tic… Tac… Tic… Tac… Tournoi de pâte à modeler… MAMAN t’es ou ?… MAMAN… MAMAN… MAMAN… Brosse toi les dents et va te coucher ! MAMAN… Dix bisous et cinq histoires plus tard… Je suis dans mon lit, enfin dans le noir… Tic… Tac… Tic… Tac… MAMAN… MAAAAAAAMAAAAAAN… Je peux venir dans ton lit ? J’ai fait un gros cauchemar…

8h02

S’il vous plaît ? Sortez moi de là !

8h37

Comme prescrit par la maîtresse, on suit les rituels du matin : écrire la date, se présenter en Anglais… Et mimer en musique, chaque jour depuis le début du confinement, la fameuse chorégraphie disponible ici.

Je décline toute responsabilité quant aux conséquences et séquelles psychologiques consécutives à l’écoute de ce morceau.

8h56

Leçon de grammaire. L’homonymie « est » / « et ». Ça paraît simple comme ça… La douce mélodie « Head, shoulders, knees and toes » me trotte encore dans la tête (cf. 8h37).

9h32

C’est l’heure des maths. Rafi m’explique la table de 2. Attends mon coco, puisque c’est si simple, on passe aux équations à une inconnue. Objectif d’ici la fin du confinement : maîtriser les fonctions dérivées.

10h12

On attaque les racines cubiques. Mon fils se transforme en ressort épileptique. J’ai peut-être poussé la machine un peu loin. Il escalade le mobilier, shoote les coussins.

10h23

Ça fait dix minutes qu’il donne des coups de pied dans le vide. Après sept jours d’enfermement, je lui propose de sortir s’aérer. Refus catégorique : « Non, c’est interdit, c’est le confinement ! »

On écoute le replay de l’allocution de Macron. Convaincu d’être dans son bon droit, il enfile ses baskets et attrape sa trottinette.

10h37

Dans les escaliers, avalanche de questions :

« Est-ce qu’il y aura le coronavirus dehors ? » Peut-être. Le coronavirus se balade sur les gens, il peut rester sur une poignée de porte, ou sur un objet, donc interdiction de mettre tes doigts partout, et douche intégrale au retour.

« Et si jamais on croise les gendarmes ? » Si on croise les gendarmes on leur montrera le papier, et on leur dira que ça fait une semaine que tu n’as pas vu le ciel.

10h45

La police est bien là. « Ils vont nous arrêter ? »… Les passants portent des masques « Ils ont le coronavirus ? »…

A l’abri des voitures, dans une ruelle peu passante en guise de skate-park, mon apprenti rider s’entraîne à la vitesse.

11H08

« Je m’ennuie, j’aime pas ce sol, la trottinette elle avance pas vite dessus. »

On rentre.

11h10

« Et on aura le droit de faire : demain on sort pas, après-demain on sort, après-demain demain on sort pas, après-demain demain demain on sort ? »

Oui, on aura le droit. Mais pas trop longtemps, tu as entendu le président…

Décontamination sur le pallier. Et la douche ! On est jamais trop prudent.

14h03

On a fini les devoirs. J’invente des mots dont Rafael doit trouver la définition. Comme il y arrive très bien, je lui donne à résoudre des équations sans solutions.

17h28

J’ai trois discussions en cours sur Messenger. Ça fait autant de théories du complot. Dans le désordre :

« Sur le long terme, la pandémie va arranger les pays latins, un peu comme la canicule de 2003. »

« Ils retardent les traitements à la chloroquine pour trouver un autre médoc et le vendre deux fois plus cher »

La meilleure pour la fin :

« C’est le déploiement du réseau 5G qui a causé le coronavirus, et pas un pangolin »

20h00

Après les applaudissements quotidiens, Edouard Philippe est l’invité du JT de TF1. A part la fermeture des marchés, il ne nous apprend rien.

22h59

Message de A.V. : « Alors les parents qui ont élevé leurs gosses comme des enfants rois, ça se passe comment le confinement ? »

Jusqu’ici, pour nous, tout va bien.

Episode précédent : Journal de mon confinement #6

A propos de Bahia L. 32 Articles
A mes inexistantes heures perdues, je cultive l'ennui et la lenteur, et n'ai de meilleure compagnie que celle du vide et du silence. Le reste du temps, j'aspire à ne rien faire. http://eklektike.com/ https://www.facebook.com/bahia.lachnani